Le Pont de la Perche
Mise à jour : 10 août 2010

Reconstruit dans les années 1999 - 2000, après 60 ans d’abandon, le pont de la Perche a maintenant fière allure. Aujourd’hui emprunté par des randonneurs et quelques engins agricoles, il n’en a pas toujours été ainsi...

Ce pont, dont la construction remonte à l’époque romaine, est situé sur l’ancienne voie impériale qui conduisait de Rennes à Vannes. Il enjambe la rivière AFF, frontière naturelle entre le Morbihan et l’Ille et Vilaine ; aux confins de trois communes ; Guer, Comblesac et Les Brulais, au lieu-dit : La Perche.
Avant la construction du pont du Tertre en amont (route de Rennes à Guer) et du pont Saint-Melaine en aval (route Comblessac à Guer) ce pont était un lieu de passage très fréquenté ; principalement par les habitants des villages voisins qui passaient là pour se rendre à la foire de Guer.

L’entrée du pont
L’entrée du pont de la Perche
Le pont côté Est

Cette importante voie de communication entre les deux départements a commencé à tomber en désuétude en raison de la construction de la voie ferrée Messac-Guer, qui passe à proximité et inaugurée en 1903. Le pont a par ailleurs été largement fragilisé par le passage de charrois de pierres, nécessaires à cette dernière.

Puis la végétation s’est emparée de l’ouvrage ; des racines se sont immiscées entre les pierres de maçonnerie et les ont déplacées. Ainsi les voûtes ouest et centrale se sont éboulées sur la moitié de leur largeur. Le bec de la pile ouest et l’assise de la pile ouest aval ont complètement disparu par affouillement.

« Le début de l’éboulement date de 1929 ; mais les charrettes ont continué de passer sur le pont jusqu’en 1940 »

Le pont de la Perche, vu de la route, côté Est  
Le début du chantier Les deux gabarits de voûte
Premiers coups de pioche, été 1999. On aperçoit très nettement l’arche Nord totalement envahie par la végétation mais encore préservée. L’arche centrale quand à elle, est totalement écroulée, tandis que l’arche Sud, l’est à moitié. Le cours de l’AFF a été dévié sous l’arche encore debout, pendant la première partie des travaux.
Des gabarits en bois ont été aménagés sous les deux arches à reconstruire.

Plan de coupe, coté, du pont de la Perche. (fichier .pdf : clic !)
Carte au 1/20 000e de 1960 de La Perche (Fichier interactif : clic !)

Le 16 novembre 1930, M. Emile LASSAIS (*), propriétaire du moulin situé juste en amont du pont, écrit aux Maires de Guer, Comblessac et Les Brûlais pour les informer que le Pont de la Perche est devenu dangereux et la circulation impossible. L’écroulement continua à l’automne 1931 après le passage d’une charretée de pommes! La brèche s’est ouverte à l’endroit où la roue venait de s’appuyer...

Le meunier et son épouse redoutent de le voir s’écrouler ce vieux pont de la « Perche ». Ce jour-là, leur maison, leurs bâtiments seront inondés, car les ruines constitueront un barrage insurmontable. L’eau se retournera vers les bâtisses et la pâture. Déjà, régulièrement, à cause de la vétusté de l’édifice (sans doute ne tient-il plus, selon M. Lassais, que par les branches et les racines qui l’enserrent), l’Aff déborde. Chaque année, la cave est inondée, il y a bien un mètre d’eau.

A ses craintes constantes de voir l’édifice s’effondrer s’ajoutent les risques de chutes qu’encourent les personnes empruntant le passage. Si elles sont moins nombreuses, il n’en reste pas moins que les lieux sont fréquentés régulièrement par des militaires en manœuvres, des chasseurs, des pêcheurs, des promeneurs, des enfants de colonie de vacances ou, tout simplement, des écoliers qui, en compagnie de leurs maîtres, viennent contempler le vieux pont et la voie romaine. Il n’y a pas même une pancarte attirant l’attention du visiteur... On ne peut avoir oublié que l’état d’abandon du pont provoqua, il y a quelques années, la chute et la mort d’un certain M. Hervy et peu après, la chute de deux militaires en manœuvres, lesquels furent blessés. M. Lassais - qui avait fait en vain maintes pétitions avec des villageois voisins - voulut remettre le problème à l’ordre du jour à partir de ces faits tragiques. La municipalité guéroise - et elle seule - entreprit tout de même de faire poser une clôture, ce qui présente un bien mince parapet.

(*) La famille Lassais est propriétaire des lieux depuis plus de quatre siècles. Le moulin a tourné jusqu’en 1934. Son activité principale était la farine de blé et de blé noir mais aussi des aliments pour les animaux. Elle cessa à l’arrivée des minoteries.

 
Construction de la pile centrale
Construction achevée
Arche centrale
Bec de pile 2 (amont) Pile 2, achevée (aval) Reconstruction de l’arche centrale
Dimensions de l’ouvrage en schiste :

Longueur totale avec les accès : 36 m
Longueur du pont entre les culées : 18 m

Largeur entre les becs de pile : 8,70 m
Largeur du tablier : 6,60 m

Largeur de chaque arche : 3,70 m
Largeur des piles : 1,80 m

Hauteur sous chaque arche : 3,20 m
Hauteur du tablier : 4 m

Détail de la voûte

Le pont venait, non pas de mourir, mais d’entrer, en agonie, usé par le temps. « Les pierres qui étaient tombées ont simplement été déblayées, et depuis ç’a été fait plusieurs fois, sinon l’eau ne pourrait même plus passer du tout... ».

« II faut que le pont soit détruit ou reconstruit », disait M. Lassais. On comprendrait à moins son indignation. Mais il y a tout intérêt à conserver et reconsolider le vieux pont de la « Perche ». A l’heure de la revalorisation des sites et de la protection de l’environnement, sa reconstruction apparaît comme une évidence. Certes, le pont est situé dans un endroit qui n’est pas très en vue, mais les lieux présentent une valeur architecturale, culturelle et historique.

Le pont a été porté à l’inventaire des ouvrages antérieurs à 1750 ; des réparations y ont été pratiquées en 1776. Depuis, aucuns travaux d’importance n’y ont été effectués. Une subvention des deux départements avait été allouée au début des années 1930 pour le chantier : 80 000 F à l’époque, mais l’argent a servi à autre chose... Fallait-il pour autant laisser disparaître cet élément de notre patrimoine ?
L’ingénieur des T.P.E., M. Chapellier, ne le pense pas. Pour lui comme pour Mlle Hochet et les élus des trois communes et des deux départements riverains, il convient d’entreprendre sa restauration.

Dans une note en date du 11 juin 1982 adressée au docteur Menand, président du syndicat intercommunal pour l’aménagement de la rivière l’Aff, M. Chapellier fait notamment état de la sécurité. Pour lui, cette question est à considérer sous deux aspects : Tout d’abord, II convient d’assurer le bon écoulement des eaux, première mission du syndicat et motivation de l’Intervention des riverains à l’amont du pont.

Cet écoulement peut être rétabli et assuré par un curage entre les piles du pont, en prenant soin de ne pas affouiller trop profondément pour éviter d’affaiblir les fondations des piles. Par la réhabilitation et le nettoyage du lit de la rivière à l’amont et à l’aval de l’ouvrage ; par la réfection et la mise en forme des becs de piles afin d’assurer un écoulement dirigé et plus laminaire.

Mais le premier travail - et le plus important - devra consister dans la résection de la végétation abondante, le confortement de la pile ouest et le rejointoiement de la base des voûtes. Dans tous les cas, les travaux à réaliser sont importants et coûteront chers.

Qui paiera ? Un devis estimatif établi en 1997 avoisine les 12 millions de centimes (francs) pour effectuer la restauration totale de l’ouvrage. Les demandes réitérées du président Menand auprès du ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation sont restées sans réponses. Restent les collectivités locales ; départements et Région.

Le syndicat intercommunal pour l’aménagement de l’Aff peut compter sur 100 000 F : 20 000 F attribués par le département d’Ille-et-Vilaine ; autant escomptés de celui du Morbihan. La part des communes - 40 000 F - se répartit ainsi : 20 000 F pour Guer ; 10 000 F pour Les Brûlais et 10 000 F de Comblessac. Si l’on s’en tient au devis de 120 000 F, il manque encore 20 000, F qui seront trouvés auprès de la Région.

En 1999, les travaux démarrent ; ils dureront un an. Du bel ouvrage en réalité. Ainsi réhabilité, le pont de la Perche peut encore vivre dans la sérénité pendant les décennies à venir. Du même coup, il n’a pas manqué de s’y créer un parcours de randonnée piétonnier ou équestre. Ce ne sont pas les riverains ni les amis de la nature qui s’en plaindront.

 
Pont de la Perche, aujourd’hui
Le Pont de la Perche enjambant la rivière AFF, après reconstruction ; face Ouest, côté aval. (Photo : 30 mai 2005)
L’Aff et la dérivation Des vététistes sur le pont
Côté amont du pont (face Est) ; on aperçoit à gauche,
la rivière Aff, puis le canal de dérivation provenant
du moulin de la Perche.
Au centre, une île où broutent paisiblement des chèvres.
Partie supérieure du pont ; utilisée principalement par
des randonneurs, à pied ou à Vélo, mais aussi par
quelques engins agricoles. (Photos : 9 mai 2010).
En arrière plan, en lisière de bois : l’ancienne voie ferrée.
  Bibliographie : Les Infos : N° 110 Mars 1978
                      Ouest France : Août 1998
                      Mairie de Comblessac
Photos et documentation : André Poirier - Jean-Charles Caillard

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